Château de Cleppé 42
Juillet 2013
Aujourd’hui nous avons du mal à imaginer la vie qui existait dans ce grand château qui occupait toute la surface de ce terrain. Il faut dire que ce château a été essentiellement habité par des femmes car il a était donné en apanage : un apanage est la concession d’un fief prise sur le domaine royal concédé par le roi, aux veuves ou aux filles des comtes.
Sortie des bords de Loire animée par René Fessy
Aujourd’hui nous avons du mal à imaginer la vie qui existait dans ce grand château qui occupait toute la surface de ce terrain. Il faut dire que ce château a été essentiellement habité par des femmes car il a était donné en apanage : un apanage est la concession d’un fief prise sur le domaine royal concédé par le roi, aux veuves ou aux filles des comtes.
La première femme qui séjourna au château fut la Comtesse Jeanne de Montfort l’Amaury. Elle était la veuve de Guy VI, Comte de Forez. Elle entreprit des transformations en 1274-1275. Toutefois, sa résidence la plus habituelle était au château de Chambéon. Elle affectionnait également beaucoup Feurs et comme témoignage de sa charité envers les pauvres, elle y fonda la léproserie de Saint-Antoine. Puis sa fille Isabeau s’installa au château lorsqu’elle devient veuve de Béraud de Mercoeur.
Lorsque Jeanne de Bourbon, épouse de Guy VII comte de Forez, qu’elle a épousé en 1318 à l’âge de 8 ans !!! et qui séjournait au château de Donzy revendiqua la domination exclusive du comté, elle se heurta à la résistance de Louis II de Bourbon l’époux de sa petite fille Anne Dauphine d’Auvergne. Elle finit par céder ses droits à sa petite fille. Le Comté de Forez passa aux mains des Ducs de Bourbon en 1372. Le traité signé à cette occasion au château de Cleppé rendit la paix à notre province. En échange la comtesse demanda à sa petite fille de l’entretenir au château de Cleppé. Elle exigea entre autre que sa maison soit constituée de 33 personnes sans compter les valets et de dix huit chevaux. Alors commença pour Cleppé et son château une ère de prospérité et de plaisir. La comtesse y vécut une vingtaine d’années et y mourut en 1402 âgée de 92 ans.
A sa mort, sa petite fille Anne Dauphine, duchesse et comtesse résidait aussi souvent que possible à Cleppé. En pleine guerre de 100 ans, son mari très occupé par son rôle politique auprès du roi de France Charles VII, lui laissa la charge entière de la gestion du Forez. De part ses fonctions elle dut voyager dans tous les châteaux de son Comté qui était très vaste puisqu’il comprenait le Château de Moulins dans l’Allier où plus tard elle fut enterrée. A la mort de son mari, elle se retira définitivement à Cleppé. La cour d’Anne Dauphine était encore plus brillante que celle de sa grand-mère. Elle disposait d’une soixantaine de personnes et d’une cavalerie de 70 à 80 chevaux. Elle agrandit et embellit le château et autour d’elle afflua toute la noblesse du pays et plusieurs membres de cette noblesse allèrent même aménager des logements au village pour être plus proches de leur comtesse. D’ailleurs le château de Cleppé fut surnommé « le petit Versailles des Comtes Forez ».
Ses livres de compte ont été conservés aux archives départementales. Ainsi on connaît par exemple la dépense de bouche faite par la Duchesse Anne Dauphine pour le jour de Pâques 1409. Il fut tué, consommé ou mis en réserve, du poisson, 5 moutons, 1 bœuf, 1 veau, 13 chevreaux, 40 poules, 6 poussins, 3 pigeons, 1 oison, 120 œufs, 38 douzaines de pain, 46 septiers de vin. Un septier devait représenter environ ½ litre. La duchesse Anne en buvait un par jour. Sa fille 2. En plus de son personnel et de sa suite, la duchesse nourrissait chaque jour de 20 à 30 pauvres. La dépense du lundi de Pâques fut à peu près la même. Un second bœuf fut acheté au prix de 9 livres au sieur Nicolas de Villeneuve commune de Chambéon et fut consommé dans la journée. Nous pouvons juger par là de l’importance de la maison que la duchesse Anne entretenait à Cleppé, de l’animation et de la prospérité que sa présence devait procurer à ce village.
Toujours d’après ses livres de comptes nous pouvons remarquer qu’un pain de sucre de 4kg500 était payé 4 livres 10 sous. Tandis qu’un bœuf, dont le poids n’est pas indiqué mais qui ne saurait être inférieur à 250 kg était payé 8 à 9 livres. 500 g de sucre coûtait donc en 1409, environ 30 fois plus que 500 g de viande. Une poule coûtait 3 fois plus qu’une livre de bœuf.
Après la mort d’Anne Dauphine qui survint à Cleppé en 1416 à l’âge de 59 ans le château ne servit plus que pour les rendez-vous de chasse.
Ensuite, il faut attendre 1452 pour qu’un autre évènement important se passe à Cleppé. Le roi de France Charles VII furieux du mariage secret de son fils, le futur Louis XI, avec la fille du Duc de Savoie arrive à Cleppé avec 600 soldats en route pour la Savoie. Le Duc de Savoie prévenu préfère se hâter de venir à sa rencontre. Des entrevues eurent lieu et finalement le roi bon prince préféra accepter le mariage et la soumission de son fils qui complotait contre lui. Des accords furent signés au château et le roi accorda même sa fille Yolande en mariage avec le Duc Louis de Savoie. Le mariage fut célébré dans l’église du prieuré et donna lieu à des fêtes somptueuses. Le roi resta un mois à Cleppé.
Plus tard, après une réunion du Comté de Forez au royaume de France sous François 1er, un grand nombre de châteaux sont cédés à des particuliers moyennant finances. Ces engagements amenèrent la ruine puis le démantèlement des châteaux. C’est en 1543 que le château de Cleppé fut engagé pour la 1ère fois. Puis Richelieu le fit démanteler au début du 17ème siècle. Les ruines servirent de matériaux de construction pour des maisons du village.
Marie-Ange Faverot
Conseillère municipale de Cleppé